Production Manager chez H&M au siège à Stockholm, Moa Brannäs évolue depuis plus de huit ans au cœur de la création de campagnes internationales. Après avoir piloté pendant plusieurs années les campagnes enfants, elle orchestre aujourd’hui la production des contenus social media globaux pour la ligne FEMME sur TikTok et Instagram. Entre innovation créative, gestion de la pression, voyages au service de l’inspiration et collaboration avec des talents du monde entier, son rôle illustre parfaitement l’évolution des métiers de la production à l’ère des réseaux sociaux.
Dans cette interview, Moa Brannäs revient sur ce qu’elle aime le plus dans son métier, sur la manière dont la création s’est réinventée pour le social media, partage des anecdotes de campagnes marquantes, et explique comment des projets personnels comme la communauté SweDance nourrissent son équilibre, sa créativité et sa vision du travail.
Un parcours façonné par la créativité
Tu travailles depuis huit ans sur les campagnes H&M; des collections enfants jusqu’aux contenus social media globaux pour la ligne FEMMES Qu’est-ce que tu aimes le plus dans ton rôle de Production Manager, même lors des journées les plus intenses ?
Ce que j’aime le plus, c’est être très proche du résultat final. Aujourd’hui, je travaille sur des contenus social media avec des délais de production bien plus courts qu’avant, et ça change tout.
Le travail peut être intense, parfois chaotique et exigeant, mais c’est justement ce qui le rend passionnant. J’aime être la personne qui transforme des idées en quelque chose de concret, surtout quand le temps manque et que la pression est forte.
H&M est une immense organisation mondiale, ce qui peut représenter un vrai défi, mais cela signifie aussi collaborer avec des personnes extrêmement talentueuses, venues du monde entier. Quand tout s’aligne, c’est profondément gratifiant.
Réinventer la création pour les réseaux sociaux
Les plateformes sociales évoluent à une vitesse folle. Comment fais-tu pour maintenir une créativité fraîche et innovante pour des audiences globales sur TikTok et Instagram, qui attendent du nouveau chaque jour ?
Travailler chez H&M, c’est être entourée de personnes très talentueuses et bénéficier de ressources que beaucoup d’équipes n’ont pas. C’est un privilège, mais aussi une responsabilité : avec une audience mondiale, il y a très peu de place pour jouer la sécurité.
De nature, je suis très curieuse et j’adore repérer les tendances émergentes. J’aime tester des choses très tôt, parfois même avant qu’elles ne soient vraiment validées, et je n’ai pas peur d’essayer des idées qui pourraient ne pas fonctionner. Les réseaux sociaux vont trop vite pour le perfectionnisme. Ce qui compte vraiment, c’est le mouvement, la pertinence, et la capacité à s’adapter en temps réel.
Les meilleurs résultats naissent souvent de cet équilibre entre curiosité, expérimentation et équipes solides des personnes qui questionnent les idées, les affinent, et savent aussi quand dire "non". C’est cette dynamique qui fait avancer le travail et le rend vivant.
Quand le métier évolue…
Comment le rôle de Production Manager a-t-il évolué depuis tes débuts ? Quelles compétences ou postures sont devenues essentielles aujourd’hui ?
Depuis mon passage des campagnes traditionnelles aux contenus social media, j’ai dû apprendre à naviguer avec les changements permanents, à prendre des décisions rapides, et surtout à soutenir les équipes plutôt que de tout contrôler.
J’ai appris à m’appuyer davantage sur mon instinct, sur la communication et la collaboration, et à accepter de ne pas toujours avoir toutes les réponses. Ce changement m’a profondément transformée - et clairement dans le bon sens.
Une anecdote marquante en coulisses
Y a-t-il une campagne qui t’a particulièrement marquée par un défi, une surprise ou même un moment de chaos devenu un souvenir fort ?
Un moment qui m’a vraiment marquée s’est déroulé lors d’une production social media à Londres pour la collaboration avec Glenn Martens. J’étais sur place avec notre Directeur Artistique, Johan, qui est arrivé vêtu d’une tenue audacieuse, totalement inattendue (et très révélatrice).
Cela a immédiatement donné le ton de la soirée : la glace a été brisée, les conversations se sont lancées, et cela a rappelé à tout le monde que la mode doit aussi rester ludique et un peu intrépide.
Glenn, lui, était extrêmement agréable à travailler : calme, direct, ouvert aux idées. Aucune hiérarchie pesante, aucun drama. C’est devenu l’une de ces productions où tout fonctionne non pas parce que tout est parfait, mais parce que tout le monde reste détendu et concentré sur l’essentiel.

Voyager pour créer : la liberté du mouvement
Tu parles souvent du plaisir de voyager pour les productions. As-tu vécu un moment où un lieu, une culture ou des rencontres ont influencé le résultat final de façon inattendue ?
Quand je voyage pour une production, je me sens presque toujours plus libre. Être dans un nouvel environnement, entourée de personnes et de rythmes différents, m’aide à lâcher prise et à sortir de mes idées préconçues.
J’ai remarqué que chaque rencontre apporte quelque chose, même les plus anodines. Souvent, ce n’est pas un grand choc culturel qui change tout, mais l’accumulation de détails : le rythme d’une ville, la lumière, les gens croisés en chemin. Ces éléments influencent subtilement les décisions et orientent le travail vers quelque chose de plus sincère et c’est souvent là que le contenu devient le plus juste.
Des personnes du monde entier, des idées multiples
Travailler avec des créatifs et des talents venus du monde entier t’apporte quoi, en termes de narration… et sur le plan personnel ?
Ces collaborations m’ont appris que le storytelling ne consiste pas à avoir l’idée la plus LOUD, mais à savoir ce qu’il faut garder ; et ce qu’il faut laisser de côté. Les points de vue différents bousculent sans cesse nos certitudes, et avec le temps, cela affine notre compréhension de ce qui compte vraiment.
Sur le plan personnel, je pense que l’un des plus grands avantages de l’âge, c’est qu’on s’inquiète moins. Aujourd’hui, je fais davantage confiance à mon intuition, dans le travail comme ailleurs. L’expérience m’a rendue plus calme, plus décisive, et plus à l’aise avec l’incertitude. Cette confiance est devenue un pilier de ma façon de travailler.
Décompresser et rester créative
Quand les deadlines s’enchaînent et que les journées sont bien remplies, comment fais-tu pour évacuer le stress et recharger les batteries ?
Haha! Le longboard dancing, évidemment.
C’est radical. Quand je suis sur la planche, tout disparaît : les deadlines, les décisions, les listes. C’est à la fois physique, créatif et ludique, et cette combinaison m’aide à me recentrer. C’est là que je trouve mon équilibre et que je reste connectée à ma créativité.

SWEdance : d’une envie personnelle à une vraie communauté
Tu as cofondé SWEdance en Suède. Qu’est-ce qui t’a donné envie de créer cette communauté de longboardeur?
Honnêtement, au départ, c’était pour des raisons très égoïstes : je voulais juste trouver des gens avec qui skater.
Mais au fil du temps, c’est devenu bien plus grand que ça. J’ai rencontré des personnes incroyables ; pas seulement à Stockholm et Malmö (mention spéciale à Bekah ❤️), mais aussi au Portugal ou en France (big up à Cécile ❤️).
À travers SWEdance, j’ai appris à construire et à faire vivre une communauté, et même à créer une association de zéro. J’ai aussi rencontré Dan, Mike et Andreas de Kahalani Boards, qui sont devenus à la fois des collaborateurs clés et de véritables soutiens.
Tout n’a pas été simple. Il y a eu des moments frustrants, et parfois un vrai sentiment de solitude. Mais j’ai énormément appris; sur le leadership, la patience, et sur moi-même. Et au final, ça en valait vraiment la peine.

9. Quand la communauté nourrit le travail
En quoi le fait de créer et diriger une communauté comme SWEdance influence-t-il ton travail chez H&M et ta vision créative ?
Créer SWEdance a été bien plus difficile que je ne l’imaginais. Je ne connaissais rien au fonctionnement du monde associatif, donc beaucoup de choses se sont faites sur le tas; parfois à mes dépens.

Mais j’ai appris une chose essentielle : tant qu’on continue d’avancer, même d’un petit pas, les choses finissent souvent par s’arranger. Cet état d’esprit m’accompagne aujourd’hui chez H&M. Quand une situation est floue ou compliquée, je ne me fige pas; j’avance.
On n’a pas toujours besoin d’un plan parfait. Le mouvement, la patience et la confiance dans le processus comptent souvent bien plus.