Les défis de l'esprit désengagé pour les dirigeants

L’étude Just Think: The Challenges of the Disengaged Mind (Wilson et al., 2014) explore ce qui se passe lorsque nous sommes seuls, sans distraction, et que nous devons simplement réfléchir. Pour les dirigeants, comprendre ces mécanismes est essentiel, car la capacité à penser clairement, même en l'absence de stimulation, influence la prise de décision, la stratégie et la créativité.

Objectifs de l'étude

L’objectif principal était d’examiner le plaisir ou l’inconfort ressenti lorsqu’une personne est laissée seule avec ses pensées. Les chercheurs se sont demandé si la réflexion libre était agréable, ou au contraire éprouvante, et comment les individus réagissent face à cette absence de stimulation.

Méthodologie

L’étude repose sur 11 expériences impliquant principalement des étudiants :

  • Les participants devaient rester 6 à 15 minutes seuls dans une pièce sans distraction et réfléchir librement.
  • Ils répondaient ensuite à des questionnaires sur le plaisir, la difficulté de concentration et la tendance à l’esprit vagabond.
  • Dans certaines expériences, des alternatives externes (magazines, internet) étaient proposées pour comparer la perception du temps passé à penser seul.
  • Une expérience particulière offrait aux participants la possibilité de s’administrer une décharge électrique légère plutôt que de rester seuls avec leurs pensées.

Résultats principaux

Les résultats révèlent plusieurs tendances importantes :

  • Peu de plaisir à juste penser : la majorité des participants n’ont pas trouvé cette expérience très agréable.
  • Activation de l’esprit vagabond : beaucoup ont indiqué que leurs pensées dérivaient facilement.
  • Préférence pour des activités externes : lire un magazine ou naviguer sur internet était perçu comme plus agréable que de rester seul avec ses pensées.
  • Stimulation même négative : certains ont choisi de recevoir une décharge électrique plutôt que de rester sans distraction.
  • Différences individuelles : les personnes habituées à la rêverie constructive ont mieux apprécié l’expérience que celles ayant des difficultés d’attention.

Implications pour les dirigeants

Pour les dirigeants, cette étude met en lumière plusieurs enseignements pratiques :

  • Le simple fait de « rester seul pour réfléchir » peut être plus difficile que prévu. Il est souvent préférable d’encadrer le temps de réflexion avec un thème ou un objectif précis.
  • La créativité et la prise de décision ne se développent pas toujours spontanément lors de moments sans distraction. Une structure légère, comme des questions-guides ou des brainstormings encadrés, peut être plus productive.
  • Les périodes de réflexion courte mais intentionnelle peuvent renforcer la productivité, à condition d’accepter que l’esprit vagabonde et de ne pas se juger pour cela.
  • La variabilité individuelle suggère que certains collaborateurs bénéficieront d’espaces de solitude, tandis que d’autres préféreront un cadre collaboratif ou des activités guidées.

Le sujet de la procrastination

Le fait que certains participants aient préféré s’administrer une décharge électrique plutôt que de rester seuls avec leurs pensées illustre une tendance à fuir l’inconfort cognitif. Pour les dirigeants, cela suggère que la procrastination peut parfois être motivée non par manque de discipline, mais par une difficulté à rester confronté à des pensées non structurées ou désagréables. Mettre en place des cadres clairs, des objectifs précis et des étapes concrètes pour la réflexion ou la prise de décision peut réduire cette tendance à retarder l’action et améliorer la productivité personnelle et d’équipe.

Qu'en penser?

L’étude de Wilson et al. démontre que « simplement penser » est souvent moins agréable et plus exigeant que ce que l’on imagine. Pour les dirigeants, comprendre ces dynamiques permet de structurer efficacement les moments de réflexion personnelle et collective, maximiser la créativité et améliorer la prise de décision stratégique. En bref, il ne suffit pas de s’isoler pour penser ; la manière dont on organise ce temps influence directement sa valeur.

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